Sunday, October 15, 2006

Suivre le troupeau n'est pas toujours bon en stratégie: le cas BCE



BCE vient d'annoncer qu'elle va se réorganiser et laissé de côté l'entité corporative de BCE en fusionnant ses unités avec Bell Canada en formant une fiducie de revenu. Il est vrai que les sociétés de portefeuille qui ont des unités très diversifiées font face à ce qu'on appelle le portfolio discount , c'est-à dire que la valeur marchande du conglomérat dans une entité regroupée (BCE par exemple) vaut moins que la somme de chacune des entités vendu séparément. Cette escompte est plus importante quand les unités sont très peu liées entre elles. Dans le cas de BCE, les entités Bell Globemedia, Bell Canada, CGI avaient un certain lien entre elles et on ne pouvait parlé de diversification hautement non reliée. Il s'agissait plutôt de diversification faiblement reliée dans le secteur des réseaux (téléphonie, avec informatique et télédiffusion ) et du contenu (poste de télé, site webs, journaux). Jean Monty avait lancé l'idée que ces unités pouvaient développées des synergies entre elles et créer plus de valeur de façon regroupée que de façon indépendante. Cette idée n'a pas vraiment été développée ou poursuivie par son successeur et BCE a commencé à vendre plusieurs de ses investissements: une partie de Bell Globemedia, de CGI, de Emergis.

Or, son principal concurrent Telus, décide tout récemment de se convertir en fiducie de revenu. L'action augmente beaucoup, la compagnie paiera ainsi moins d'impôt. L'action de BCE qui fait du sûr place depuis 4 ans prend alors plus de valeur en conséquence de cette décision: plusieurs investisseurs anticipent la même chose pour BCE. À court terme, il est vrai que le traitement fiscal des fiducies de revenu fait en sorte que les actionnaires semblent gagnant à court terme: ils vont finalement payer moins d'impôt. Cependant, plusieurs analystes, (dont Stephen Jarislowski) affirment (et je partage cet avis) qu'une compagnie qui se transforme en fiducie de revenu perd beaucoup de son autonomie stratégique et réduit considérablement sa croissance à long terme. Pourquoi? Et bien en se convertissant en fiducie de revenu, BCE va devoir verser une très grande partie de ses bénéfices en dividende à ses actionnaires. BCE a un dividende très élevé qu'elle a de la difficulté à maintenir présentement ou à le faire croître. Or, en versant maintenant une plus grande partie de ses bénéfices en dividendes, la compagnie aurait définitivement moins de marge de manoeuvre pour contrer la concurrence et investir dans son avenir puisqu'elle aura moins de bénéfices non répartis. Les concurrents comme Rogers Communications et Québécor/Vidéotron qui n'auront pas choisi la voie de la fiducie de revenu pourront bénéficier de plus de flexibilité financière et d'autonomie stratégique. Ils auront plus d'argent pour investir dans des nouveaux produits et services et faire l'achat de compagnies complémentaires à leur portefeuille d'unités.

Comme quoi résister à la tentation et ne pas suivre le troupeau est une option stratégique qui peut être très payante à long terme.

Louis Rhéaume
Infocom Intelligence
infocom@videotron.ca
www.infocomintelligence.com

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